Coordination de ARICY CURVELLO
AFONSO FÉLIX DE SOUZA
— Né à Goyaz en 1925. En 1946, il fonda la revue Agora (Maintenant), avant de rejoindre les jeunes d'Orfeu qu'il dirigea avec Fernando Ferreira de Loanda. Son livre O tunel le montre déjà dégagé de l'influence des poètes de 1920-1930 et le situe nettement parmi les post-modernistes.
Bibliographie : O tunel, 1948; O sonho e a esfinge, 1950; O amoroso e a terra, 1953.
Aves sem pouso
Percorro o território do teu corpo
e um ninho, um pouso busca a boca cega
salivando saliências e reentrâncias
que dás e negas, tão cheia de graça,
e és tão cheia de ninhos, só que pairas
em páramos que esboças pelo teto
quando descerro as portas que me trancam
o coração, e o coração já voa
também por outros paramos, por onde
como soltos no espaço nós soltamos
essas aves que em vão buscam um pouso.
Des oiseaux qui ne se posent pas
Je parcours le territoire de ton corps
et un nid, un lieu de repos cherche la bouche aveugle
en salivant des saillies et des creux
que tu donnes et tu nies, si pleine de grâce,
et tu es si pleine de nids, seulement que tu planes
dans des plaines désertes que tu esquisses par le plafond
quand j’ouvre les portes qui me ferment
le coeur vole
aussi par les autres plaines désertes, par où
comme libres dans l’espace nous libérons
ces oiseaux qui en vain cherchent un lieu de repos.
( Da antologia “Poésie du Brésil”, seleção de Lourdes Sarmento, edição Vericuetos, como nº 13 da revista literária francesa “Chemins Scabreux”, Paris, setembro de 1997.Traduções de Lucilo Varejão, Maria Nilda Miranda Pessoa e outros.)
SOUSA, Afonso Félix de. Memorial do errante. Poemas. Rio de Janeiro: Livros de Portugal, 1956. 104 p. (Poesia Sempre) 11,8x17,5 cm. Retrato do autor por Rossini Perez. Ilustrações de Guima Vieira. “Afonso Félix de Sousa “
COEUR VAGABOND
Toujours à chercher je l'appelle
du haut de la tour et mes mains
qui touchent les champs de mon ciel
plongent dans le vide sans fin
toute ma vie en pêle-mêle
La ville coule en bas — déserte
Sur ma tête rêve un corbeau
Si j'ai vécu en pure perte
que le passé pleure ses eaux
mais par deux yeux d'âme verte
Et ses yeux vont se faire plumes
d'un oiseau qui vit à chanter
sur une branche entre les brumes
Sans foi mais toujours à chercher
je baigne mon coeur dans ces brumes
APPEL AUX/PASSAGERS DU MÉTRO
Passagers qui allez au travail
Passagers qui allez à l'amour
Gardez un peu votre journal
Gardez-vous de vos pensées
Dites-moi mesdames messieurs
où se trouve la rue de Rome
Je viens de loin du fond de l'abîme
que la poésie creusa dans mon âme
mais dans ce sous-sol je me vois perdu
Je veux respirer ô jeunes filles
l'air que respira Mallarmé
0 vous jeunes filles dont les yeux
sont gris et bleus et surtout doux
je vous rends mon coeur mais amenez-moi
à une maison rue de Rome
Si vous avez un autre itinéraire
je vous suivrai où vous voudrez
mais quand vous serez fatiguées
ne bâillez pas à cause de moi
guidez-moi plutôt mesdemoiselles
jusqu'au foyer de Mallarmé
Je sais que tout chemin mène à Rome
Mais pour arriver à la rue de Rome
il faut d'abord savoir chanter
VISITE À LA TOMBE DE BAUDELAIRE
Où ton silence chante où dort ta voix protonde
égaré d'un jardin d'amour qui pourrait être
je pense aux fleurs qui font la beauté de ce monde
pour couvrir ton sommeil d'une couronne ô maître
Et va comme à son nid mon âme vagabonde
se poser sur les fleurs que les pensées font naître
D'une source je vois jaillir l'eau qui m'inonde
du t'eu volé des dieux d'une étoile à paraître
Je vois Les Fleurs du Mal soufflées par ton silence
ceignant les horizons d'une couronne immense
et mon coeur ressuscite et de nouveau se perd
Où règne la beauté où la mort est mensonge
je mets toute ma vie et ce qu'elle a d'un songe
ô prince Baudelaire ô fleuve ô flamme ô frère
TAVARES-BASTOS, A. D. La Poésie brésilienne contemporaine. Antologie réunie, préfacée et traduite par A, D. Tavares-Bastos. Paris: Editions Seghers, 1966. 292 p. 14x21,5 cm capa dura, sobrecapa. Ex. col. Antonio Miranda
INVENTAIRE DU MATIN
Aucun geste ne garde la salure des eaux pourries.
Le peu d'amour sauvé arrose les rues
avec les matières les plus profondes de l'âme.
Rien qui rappelle le corps entre des murs fermés
ou les pensées articulées dans le noir.
Seulement le vent venant de là-bas où dort le plus grand
silence des mers
apportant avec lui les instants des souvenirs clairs
en cristaux de musique
(analgésique).
Ils bougent innocents.
Tout à l'heure des vapeurs d'ennui,
maintenant des gestes et des équivoques
sur des tapis mécaniques.
Ils traînent innocents.
Du sol qu'ils ont foulé volent des fragments d'anges.
Le point du jour aura absorbé les plaintes et les violons,
mais la musique demeure
faite des dépouilles de l'âme renouvelée par la rosée du matin
et de la chaleur des femmes dont nous avons oublié les traits.
« O TUNEL
LA SOURCE ET L'ORIGINE
Les innocents jouaient avec le matin
lorsque d'énormes oiseaux noirs
survolèrent le paysage.
Mois aussi je pouvais m'enfuir
par des chemins pressentis
aux flammes très légères.
Mais clair était le cristal de l'enfance
je reconnus l'étoile des rois mages
et suivis le carrosse de béton.
Ils semaient des glaives
dans les cœurs des enfants,
ils multipliaient les drapeaux
et cachaient les aurores.
Au-dessous les roues écrasaient
le Christ et les fleurs.
J'essayai encore de m'accrocher à la croix
que le carrosse emportait,
mais elle s'enfonçait dans les millions d'yeux
d'où ma larme coulait.
Et rien ne m'entraînerait de retour
à la berge aux eaux tranquilles
qui ont effacé les traces du cœur
en quête île silences et de bien-aimées.
Que le destin du corps
ne s'accomplisse pas
avant d'approfondir les chemins
où les pieds saignaient
sur les pierres et les souvenirs.
Le mouvement
ébauchant les heures,
de la haine parmi les bras
et les bouches qui s'aimaient,
des morceaux d'âme saignant,
la participation
— le chant.
Pas d'eau coulant de la source,
plutôt des éclairs dans le ciel du matin.
Des fils électriques
me faisant communiquer avec des anges
engendrés par l'abîme.
Un jour des mains très blanches
briseront les pierres,
et cette lucidité
cette tendresse
les résidus de l'enfance
renaîtront comme des fleurs
dans les ballades d'amour.
(Idem)
Página publicada em set. 2008; página ampliada e republicada em maio de 2015; ampliada em novembro de 2017. |