PEDRO LYRA
Pedro Lyra (1945) est l'un des noms les plus représentatifs de la Génération 60 au Brésil, comme poète et essayiste, avec une œuvre comprenant huit textes de poésie et huit essais.
Professeur de Poétique à l'Université Fédérale de Rio de Janeiro, il a été Professeur Invité dans les universités de Lisbonne (1986), Bonn (1987), Grenoble (1989), Clermont-Ferrand (1993).
Il est actuellement Consultant Culturel des Editions Topbooks à Rio de Janeiro.
LYRA, Pedro. Visión d´Être / Visão do Ser. Anthologie poétique. Org. trad. Catherine Dumas. Rio de Janeiro: Top Books; Paris: L´Harmallan; Fortaleza: Fundação Cultural, 2000. 258 p. 13,5x21 cm. edição bilingue “ Pedro Lyra “ Ex. bibl. Antonio Miranda
MOMENT
II pleut de la vie sur le paysage.
Et nous sortons.
Nos pas sur le gazon libèrent un parfum de vert.
La brise jette sur le visage la volupté du lointain.
Les feuilles ouvrent dans le temps un chemin de musique.
Et nous allons.
L'espace devant nous est tout de liberté.
La lune répand de la nuit dans tes yeux d'aurore.
L'amour invente l'heure dans la certitude d'être.
Et nous continuons.
Légers, notre main repose sur des nuages.
Libres, notre esprit accompagne les astres.
Clairs, notre être dépasse l'infini.
Mais nous revenons.
Volonté
de se disperser dans l'au-delà,
se fondre avec la nature humanisée
jusqu 'à ce que l'homme puisse recommencer à vivre en
paix des moments comme celui-ci.
(AMP)
MOMENTO
Chove vida na paisagem.
E saímos.
Nossos passos na grama vão libertando um perfume de verde.
A brisa vai jogando no rosto a volúpia do longe.
As folhas vão abrindo no tempo um caminho de música.
E vamos.
O espaço à nossa frente é todo liberdade.
A lua espalha noite em teus olhos de aurora.
O amor inventa a hora na certeza de ser.
E seguimos.
Leves, a nossa mão pousa sobre nuvens.
Livres, o nosso espírito acompanha os astros.
Claros, o nosso ser ultrapassa o infinito.
Mas voltamos.
Vontade
de se dispersar no além,
fundir-se com a natureza humanizada
até que o homem possa voltar a viver em paz
momentos como este.
(Decisão)
LA PAROLE DU PRIVILEGE
Si
je suis arrivé là où je suis,
j'ai mérité mon ascension.
Si
je jouis de ce que je possède,
j'ai mérité ma fortune.
Tant pis pour
qui est resté en bas :
— il ne pouvait
être
qu'une marche.
Tant pis pour
qui est resté sans rien :
—il ne pouvait
être
qu'un instrument.
La nature en a disposé ainsi.
Et l'on ne peut changer la nature.
A FALA DO PRIVILEGIO
Se
cheguei aonde estou
tive méritos para subir.
Se
desfruto o que possuo
tive méritos para somar.
Não interessa
quem ficou em baixo:
— não podia
ser
mais que degrau.
Não interessa
quem ficou sem nada:
— não podia
ser
mais que instrumento.
A natureza dispôs assim.
E não se pode mudar a natureza.
SONNET DE CONSOLATION - II
C'est arrivé - et c'est ce que tu craignais.
Maintenant
deux hypothèses posthumes :
ignorer
— si cela est encore possible,
ou oublier
— si tu en es encore capable.
(Plus que la jouissance
ne pas souffrir de sa perte :
— le destin outrepasse notre volonté.
Moins que la peine
ne pas lui donner de motif :
— personne ne peut assumer le désir d'autrui.)
Et l'existence, c'est le savoir, s'en souvenir :
— si tu l'ignores
ne creuse pas de tourment,
— si tu l'as réveillé
essaie de le dissiper :
ainsi tu la consommes sans éprouver ses méfaits.
Ce que l'on ignore n'existe pas.
Ce que l'on oublie cesse d'exister.
(CD)
SONETO DE CONSOLAÇÃO-II
Aconteceu - e era o que temias.
Agora, duas póstumas hipóteses:
ignorar
— se ainda for provável,
ou esquecer
— se és capaz de tanto.
Mais que a fruição
não lhe sofrer a perda:
— o destino transpõe nossa vontade.
Menos que a mágoa
não lhe dar motivos:
- ninguém pode assumir desejo alheio.
E a existência é o sabê-lo e sua memória:
se o ignoras
não caves um tormento,
se o desvelaste
tenta dissipá-lo
que assim a cumpres sem provar seus danos.
O que se desconhece não existe.
O que se esquece deixa de existir.
(Desafio)
POESIA SEMPRE – Revista Semestral de Poesia. ANO 4 – NÚMERO 7 – JULHO 1996. Rio de Janeiro: Fundação Biblioteca Nacional, Ministério da Cultura, Departamento Nacional do Livro, 1996. Ex. bibl. Antonio Miranda
Le deux visages
("As duas faces")
— Regarde bien, citoyen, et vois
le monde que nous construisons pour tes enfants:
Une tranquillité absolue dans les rues.
Aucun cri discordant.
Tout le monde au labeur productif.
C'est la paix, c'est l'ordre, c'est le travail.
Pas de motif d'insatisfaction.
— Je vois:
paix, ordre, travail.
Ton monde est sûr comme une caserne
et la vie a surgi pour le risque de la vivre.
Et les feuilles des arbres ne se balancent même pas:
mais moi
je rêve d'un monde au mouvement équilibré,
pas de l'annulation du mouvement;
même les pierres obéissent:
mais moi je veux
un monde où les contraíres s´harmonisent,
pas l´élimination des contraíres;
mêm les âmes transpirent:
mais moi le lutte pour un monde
où non seulement l´homme réalise des activités,
mais où les activités réalisent aussi l´homme.
Un monde
De paix, d´ordre, de travail.
(Et liberté)
Traduction de Catherine Dumas
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