POUR UN AMOUR INTÉGRAL
Poème d’Antonio Miranda
traduit par Oleg Almeida
Ilus. José Campos Biscardi
En venir à l’extrême
(toute la vie dans la main)
et faire un petit pas de plus,
transcender...
D’un seul geste ébranler l’univers,
avec une parole
quelconque
donner un cours neuf à l’histoire.
C’est que le symbole rend les hommes complices,
et la parole les nivelle tous.
Savoir bien qu’il n’existe pas d’avenir
et que le passé n’est qu’une illusion,
et pourtant être au monde,
être le temps comme tel,
faire exister toutes les choses,
même celles qui sont impossibles.
L’homme aime toutes les choses,
il les individualise,
il s’y reflète et, en les aimant,
il se régénère.
L’amour est un cas impossible,
une harmonie insoutenable,
une équation sans résultat,
mais l’homme aime.
C’est que son amour n’occupe d’espace
ni n’a de limites :
il est hors du temps.
Son amour n’aime pas en particulier,
mais en général,
car il est hors du temps,
même s’il se révèle en son temps.
Car l’amour bien-aimé
est le plus petit commun multiple de toutes les choses,
un horizon continu,
un retour éternel.
Aimer seulement pour aimer,
sans chercher dans l’amour quelque chose
qui ne soit pas cet amour.
Savoir bien que l’amour se matérialise
quand on cesse son existence,
quand on se surpasse
et pourtant assumer ce fou risque.
Aimer, tout simplement.
Aimer même sans possibilités,
transcender le moment
et le geste,
questionner sans vouloir qu’on réponde.
Aimer l’univers tout entier,
concentré dans un être quelconque,
si mesurable et conditionné,
se refléter dans cet être,
s’infecter par lui
et s’y perdre complètement
et profondément
pour que tout argument en devienne inutile
et tout jugement superflu.
Liberté !
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