JE VAIS FERMER POUR INVENTAIRE
Antonio Miranda
traduit en français par Patrick CINTAS
Chanson :
Je vais fermer pour inventaire.
Je retire de l’étalage ce qui n’a pas été vendu.
Cela ne plut à personne
Personne ne lut
Personne ne sentit.
J’ai perdu tous mes amis,
C’étaient de mauvais payeurs
Ils s’enfuirent loin de moi.
J’ai perdu du temps. J’ai tout perdu.
Mais où j’ai perdu, j’ai gagné.
Voix:
Mario préfère les vers d’amour,
Manuel les poèmes douloureux,
Maria lit
Comme qui s’arrange devant le miroir.
On me dit pamphlétaire, sentimentaloïde
Circonstanciel, et même personnaliste.
Je ne suis pas comme,
Je n’arrive pas à,
Je suis prolixe, synthétique, sec
Réactionnaire, communiste, fou.
Athée, plébéien, indécent.
Maria n’aime pas le mot purin.
Luis cherche des lieux communs.
Adalgisa, fatiguée et épuisée
Rencontre encore des péchés orthographiques.
Pour Mario, je suis cérébral, froid, géométrique
Hermétique : il ne comprend rien.
Maria comprend tout et espère plus.
L’or que j’ai touché s’est converti en ferraille.
Je reviens sur les chemins fréquentés
Et ce sont déjà d’autres chemins.
Je décroche le téléphone,
J’éteins les lumières,
Je barricade la porte
Et je casse la sonnette.
Mais je laisse la fenêtre ouverte.
Extrait de Ton pays est heureux
ANTONIO MIRANDA: Poète brésilien, écrivain, dramaturge et sculpteur, il a publié des poésies et des pièces de théâtre dans divers pays. En 1967, il décide de s’exiler et vit alors une période d’intense effervescence dans l’agitation culturelle de l’Amérique latine, produisant nombre d’ouvrages littéraires et artistiques. Sa créativité fut reconnue par la critique de plusieurs pays. Miranda a vécu et publié à Buenos Aires (Argentine), Caracas (Vénézuéla), Bogota (Colombie) et Londres. Tu País Está Feliz, pièce de théâtre jouée pour la première fois en 1971, a été jouée dans plus de 20 pays et publiée au Brésil en 1979.
Tu pais está feliz [Ton pays est heureux]- de Antonio MIRANDA
Préface et traduction en espagnol de Elga Pérez-Laborde
Thesaurus editora (Brésil)
Dernière édition (la 10e , je crois), en espagnol, du texte qui fit d'Antonio Miranda, dans les années 70, un rival de Bob Dylan et de Hair. Du moins en son pays, partant du Vénézuéla où il étudiait loin de la misère brésilienne, puis dans plus de vingt autres qui accueillirent ce théâtre de la jeunesse en colère. "Le diable a été inventé pour mesurer la grandeur de Dieu." Alors le texte tient de la diablerie, avec des voix d'adolescents, pour mesurer l'importance du mal dans les affaires du monde qui nous regarde, nous n'en doutons plus. Tout Miranda y est déjà, formé par une enfance qui le tourmente encore aujourd'hui. Ce texte a traversé le temps sans y perdre son authenticité. Au-delà de trente ans, une bonne toile ne craque plus, elle conserve sa fraîcheur pour longtemps. Il faudra à peine en restaurer l'actualité. Petits détails qui montrent que le monde n'a pas changé depuis.PATRICK CINTAS
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mensueltous les 15 du moisvendredi 22 décembre 2006
Revue d’art et de littérature, musiqueDirecteur: Patrick CINTAS
Éditeur: Le chasseur abstrait
www.artistasalfaix.com/revue/ |
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